CHOU PALMIER « NOIR DE TOSCANE »

Légume oublié :

Le CHOU PALMIER « NOIR DE TOSCANE »

Dans la foulée d’une séquence télévisée réalisée par l’équipe de l’émission « Jardins et loisirs » ( RTB1) dans notre potager didactique du Singel, c’est un chou bien étrangement majestueux et fort appréciable en cuisine que je vous présente aujourd’hui : le chou palmier dit « Noir de Toscane », ou en italien, le « Cavalo laciniato nero di Toscana« 
Pour revoir la VIDEO du reportage de Luc Noël, cliquez sur la photo ou le lien Media ci-dessous :

Jardins & Loisirs : Extrait de l’émission jardins et loisirs du 16 décembre 2012 sur Auvio (rtbf.be)

Avant de parler du « CHOU PALMIER » proprement dit – et pour éviter d’emblée une possible confusion par le vocabulaire – je précise que ce chou véritable n’a rien à voir avec le « chou palmiste », nom utilisé pour désigner les gros bourgeons comestibles formés par les feuilles et les fleurs de certains palmiers, notamment le Chémédorée (Chamaedorea elegans Martius), originaire du Mexique et du Guatemala. Le « chou palmiste » n’est évidemment pas un chou !

Ceci dit, revenons à notre chou palmier qui lui … n’est pas un palmier ! C’est simplement la forme du feuillage qui suggère l’aspect de petit palmier … ou d’une coiffe emplumée de gille de Binche. (photo supra)

Le chou palmier Noir de Toscane appartient à un genre acéphale, ce qui étymologiquement signifie « sans tête ». C’est typiquement ce que nous appelons aujourd’hui par convention de langage un « légume oublié ». Tous les choux des genres acéphales sont des légumes très peu connus dans nos régions, surtout par les citadins. En fait, leurs caractéristiques ne rencontrent tout simplement pas les critères commerciaux de la grande distribution, qui favorise quasi-exclusivement les choux cabus ou pommés, de très longue conservation et donc beaucoup plus rentables. Ils ne sont donc pas – ou très rarement – proposés à la vente. Pour en déguster, il vaut mieux les cultiver soi-même. La récolte du chou palmier n’implique pas la décapitation de la plante ; on en détache de temps à autre quelques feuilles pour préparer un bon repas le jour-même ou le lendemain, puis on le laisse poursuivre tranquillement sa vie végétative. Avec les autres principaux choux acéphales – comme le Chou perpétuel de Daubenton (vivace), le Chou plume (bisannuel), le Chou de Brême (bisannuel), le Chou de Russie (bisannuel), le Tronchuda du Portugal (bisannuel) ou le Crambé maritime (vivace), il est à mes yeux un bon exemple d’une culture à développer pour accéder à un système effectif d’alimentation durable.
La taxonomie a manifestement éprouvé quelques difficultés avec le chou palmier. Parmi de nombreuses autres propositions, le nom scientifique le plus précis me semble rester celui proposé par le botaniste franco-suisse Alphonse Pyrame de Candolle : Brassica oleracea var. acephala subvar. palmifolia DC.

Le chou palmier Noir de Toscane est aussi sympathique qu’atypique. Je l’avais découvert dans les jardins du château de Villandry en Val de Loire, sans imaginer un instant que cette magnifique plante aux longues feuilles cloquées et de couleur très foncée était également un véritable légume ancien très apprécié en gastronomie florentine. Mais un certain soir d’été, à la faveur d’une étape à Fiesole (près de Florence), nous avions pris place à la terrasse d’une petite trattoria. Et le chef – il s’appelait Annibale -, qui n’avait pas de carte à nous proposer, nous a suggéré son plat du jour : un « cotechino con lasciniato al forno». Comme je ne comprenais à peu près rien à ce que le patron voulait m’expliquer à grand renfort de gestes, il m’a pris par le bras pour aller me montrer son potager, à l’arrière de la maison. Pas de doute, le même chou qu’à Villandry ! Ainsi donc, ce drôle de chou, c’est aussi une véritable légume. Ravissement du gourmet, coup de foudre du jardinier potagiste. Pas question de quitter Fiesole sans emporter quelques graines de ce merveilleux « cavolo lasciniato nero di Toscana ». et de les ramener en Belgique.
Dès cette époque, j’ai cru logiquement pouvoir considérer ce légume comme une spécialité typiquement toscane. Sauf à Villandry, je n’en avais jamais vu ailleurs. Mais quelques années plus tard, à la faveur d’un séjour dans la région de Konya (Anatolie), j’ai observé avec surprise que tous les petits potagers qui jouxtaient les maisons contenaient chacun au moins quelques magnifiques pieds de « Noir de Toscane », cultivés comme une ressource alimentaire locale . Ainsi donc, ce chou palmier ne serait pas nécessairement une spécialité de la belle région d’Italie dont il porte le nom !?
Deux années plus tard, lors d’une rencontre Slow Food organisée au parc Tournay-Solvay de Watermael-Boitsfort, je discute « légumes oubliés » avec un membre de notre convivium Karikol. J’apprends que mon interlocuteur est d’origine turque. Il connaît parfaitement ce chou noir au feuillage lacinié ; et il affirme avec force que c’est un légume traditionnel des régions anatoliennes, que ses parents, grands-parents et aïeux le consomment depuis toujours. Cette anecdote pour exprimer le doute que j’éprouve sur l’origine géographique réelle de ce merveilleux chou palmier. Blaise Pascal ne disait-il pas : « Vérité en deça des Pyrénées, erreur au delà !» ? Autrement dit, tout est relatif ! Non, je ne sais ni de quelle époque ni de quelle région nous vient effectivement le chou palmier noir, même en écumant les bibliothèques et en interrogeant les spécialistes ! Mais cela ne m’empêche absolument pas de le cultiver et de le consommer avec beaucoup de plaisir.

Conseil de culture

Comme tous les choux, le chou palmier est très gourmand en matières nutritives. Il a besoin d’un sol riche en humus , profond, assez calcaire (idéalement, pH égal ou légèrement supérieur à 7). Son exposition doit être bien ensoleillée. En raison de la taille et de l’envergure de la plante, il vaut mieux l’installer à l’abri du vent sans gêner ses besoins en lumière. On peut le tuteurer ; en raison de son ampleur, c’est utile, même si cela lui enlève un peu de sa majestuosité naturelle.
Le chou palmier est résistant aux maladies, mais il est sujet aux attaques des altises, surtout lorsque la surface du sol est trop sèche. En plantant de l’aneth entre les plants de choux, on écarte les altises et aussi la piéride, ce papillon blanc donc les chenilles sont désastreusement voraces . De petits buissons d’aurone mâle plantés à proximité des choux sont également utiles à cette effet.
Il ne faut pas sous-estimer les dégâts causés aux feuilles par les ramiers et les tourterelles, particulièrement en période de sécheresse. Si ces colombidés ne trouvent pas d’eau stagnante à boire, ils se désaltéreront avec le feuillage de vos choux. (Prévoyez un récipient d’eau à proximité, ou mieux, recouvrez les plants d’un filet protecteur.)
Je recommande de faire le semis du chou palmier dès la mi-mars, en terrine, à l’abri ou sous châssis. Les jeunes plants pourront ainsi être mis en place juste à la fin des « Saints de glace » (mi-mai). Replantez à 70-80 cm entre chaque pied. Paillez bien autour des pieds. La première récolte de feuilles pourra être effectuée après une bonne centaine de jours.
C’est un chou considéré généralement comme bisannuel, mais il n’est pas rare qu’il vive trois ans. Les graines se récoltent la seconde année. Notre association partage ces graines avec ses membres qui souhaitent eux aussi démarrer la culture du magnifique chou palmier noir de Toscane.

Bien chlorophyllement vôtre,
José

Le GINGEMBRE : de l’amour de la cuisine à la cuisine de l’amour

De l’amour de la cuisine à la cuisine d’amour :

Le cas du GINGEMBRE

Lorsqu’on parle de plaisir des sens, il ne faut pas se voiler la face. L’art culinaire et l’art amoureux sont intimement liés. Seuls les sots l’ignorent ! Heureusement, il ne viendra sans doute jamais à l’idée de quelqu’un de séduire son amoureux en lui servant à table des biscottes et un verre d’eau.

Notre société est absurdement anesthésiée par son rythme économique, par la recherche constante et presque compulsive de rendement et de profit. Le sexologue Willy Pasini, professeur à l’Université de Genève, évoquant la pitoyable banalité actuelle de nos rapports avec la nourriture et le sexe, a osé écrire avec à-propos « la rapidité réduit la nourriture et l’amour au plus petit dénominateur commun d’un acte abstrait et conventionnel. Nous vivons à l’époque du fast-food et du fast-sex« .

Fast-food et fast-sex : deux horreurs issues du modèle social ultra-libéral et dans lequel le bien-être de l’être humain ne trouve pas son compte. Pour échapper au moins partiellement à la « libido triste » ambiante, et se trouver un meilleur équilibre personnel, certains cherchent à s’exprimer en cuisinant des plats délicieux à partager avec leur entourage. Rien de plus compréhensible et de mieux acceptable, dès l’instant où on admet que manger est à la fois une fonction affective, identitaire et sociale. Les cordons-bleus méritent l’amour et le respect qu’ils sollicitent en concoctant des mets délicieux.

Notre alimentation, c’est le berceau de nos liens affectifs. « La relation à la nourriture est la première relation que l’individu soit amené à vivre » (B. Waysfeld, psychiâtre nutritionniste). La première relation à autrui que construit un nouveau-né est celle qu’il noue avec sa mère qui lui tend le sein pour le nourrir. Cette première expérience émotionnelle agréable, liée à la découverte du rassasiement et de la sensation de bien-être qu’il procure, il cherchera à la reproduire au travers de la nourriture tout au long de sa vie. La manière dont il mangera sera conditionnée par la manière dont il se reliera et communiquera avec les autres dans sa vie sociale.

Notre alimentation n’a pas pour seul but de nous nourrir. Dans notre subconscient, elle est chargée de symboles. Elle est un « moyen d’expression, moyen de séduction, moyen artistique ou encore moyen de récompense ou de punition » (M.-A. Picard).

Voici des explications un peu ardues pour exposer comment, à leur insu souvent, certaines personnes se passionnent pour la gastronomie et manifestent leur « amour de la cuisine« . De l’amour de la cuisine à la « cuisine de l’amour« , il n’y a qu’un pas qu’il n’est pas absurde de vouloir franchir.

Si, à l’aide des connaissances scientifiques modernes, bons nombres d’ingrédients à la réputation aphrodisiaque, parfois vieille de milliers d’années, se sont révélés n’être, sinon des fables de sorcellerie, au mieux des placebos, il en existe toute une série dont les propriétés peuvent accroître naturellement et réellement notre désir amoureux.
Si vous désirez plaire, et que votre art de séduire passe par votre cuisine, sachez que vous ne pourrez pas vous passer d’ail, de cannelle, de céleri, de coriandre, de GINGEMBRE, de ginseng, de girofle, de noix, de menthe, de muscade, de poivre, de romarin, de roquette (eh oui ! Au moyen-âge on l’appelait « herbe lubrique » et elle était proscrite dans les monastères), de safran, de sarriette, de truffe, de vanille … autant d’ingrédients auxquels on prête des vertus aphrodisiaques.

Dans cette énumération, j’ai cité le GINGEMBRE. Et c’est lui que j’ai épinglé comme ingrédient aphrodisiaque pour ce billet.


Le GINGEMBRE est vraiment une plante qui a vocation d’éveiller les sens. En Chine, au Japon et dans les Indes, il est utilisé depuis la nuit des temps dans la bonne cuisine comme en médecine. Comme aphrodisiaque, les racines fraîches du GINGEMBRE ont la solide réputation d’attiser le feu intérieur de l’homme et de la femme.

Deux substances contenues dans le GINGEMBRE sont à l’origine de cet effet échauffant : le gingérol et le zingibérène.

Krishna et Râdha, les « Amants éternels’ de la mythologie indienne, dans un bosquet fleuri au bord de la Yamuna
(Miniature Kangra de la fin du 18ème siècle)
La charmante Râdha, adoratrice favorite de Krishna, vêtue du blanc de l’innocence, concentrée dans sa profonde méditation, se laisse envahir par le Sahamadi ou l’extase. Elle lui offre son cœur. L’amour de Râdha pour Krishna est le symbole de l’amour intégral sur tous les plans de l’être, du spirituel au physique.

Le gingérol est un composé phénolique à la saveur piquante. C’est lui qui donne au GINGEMBRE l’essentiel de cette saveur citronnée, nette et franche qui le caractérise.
Le zingibérène est un hydrocarbure végétal, qui en dehors du GINGEMBRE, est extrêmement rare dans la nature.
Scientifiquement, le pouvoir aphrodisiaque du GINGEMBRE tient à son action vasodilatatrice sur les organes du petit bassin et à ses vertus redynamisantes. Autrement dit, la consommation de GINGEMBRE augmente l’afflux sanguin et dissipe la sensation de fatigue, ce qui est favorable pour combattre l’impuissance et la frigidité.

Des expérimentations cliniques sérieuses ont permis de constater que l’homme qui mange du GINGEMBRE améliore sa spermatogenèse et son érection.

Les propriétés adaptogènes (celles qui aident à lutter contre le stress) et tonifiantes du GINGEMBRE, accroissent le désir, libérent les inhibitions et favorisent l’orgasme, aussi bien chez l’homme que chez la femme.

Je rappelle que toutes ces propriétés sont liées à la consommation de la racine de gingembre frais. Le gingembre sec est aussi un ingrédient classique de cuisine épicée, mais ses vertus aphrodisiaques, si elles subsistent, sont devenues insignifiantes.

Lorsque vous achetez du GINGEMBRE, préférez – si vous avez le choix – celui qui provient d’Inde ou d’Afrique. (Depuis bien longtemps déjà, le GINGEMBRE est cultivé aussi à grande échelle dans l’île de la Jamaïque (Antilles), et plus récemment en Chine. Mais ce gingembre-là, s’il a souvent plus bel aspect aux yeux des Occidentauc, n’a pas un goût aussi appréciable en fine cuisine.)

Après un épluchage parfois fastidieux, le GINGEMBRE peut être soit coupé, haché ou rapé pour être ajouté aux plats. C’est cependant sous sa forme rapée qu’il libère le mieux son jus, plus particulièrement riche en principes thérapeutiques.

Le meilleur GINGEMBRE est celui qui forme un « main« . On appelle « main de gingembre » les jeunes racines des extrémités de sa souche, ressemblant à une multitude de doigts minuscules aux formes très tourmentées. Sa préparation est plus laborieuse, mais il est nettement supérieur aux gros rhizomes.

A ceux qui privilégient le régime sans sel, le GINGEMBRE, riche en sodium, permet de se dispenser de cet ingrédient dans l’assaisonnement.
Outre ses propriétés aphrodisiaques, le GINGEMBRE possède d’innombrables autres vertus. En cuisine, il stimule notamment les sécrétions digestives et facilite la digestion. Il soulage les maux d’estomac et les états nauséeux liés au « mal du voyage » ou au début de la grossesse.
Il apaise les coliques, réduit les flatulences et stimule l’appétit.
Récemment, son action anti-cancérigène a été scientifiquement démontrée.
Pour terminer, voici pour votre bon plaisir, une petite recette de « thé de gingembre« , version José.

« Thé » de gingembre

Ingrédients
  • 1/2 càc de gingembre en poudre
  • 1 càc de miel
  • 250 ml d’eau bouillante
  • 1 c. à S. de cognac

Préparation

Mélanger le gingembre et le miel dans l’eau bouillante.
Ajouter un soupçon de cognac et laisser tiédir avant de boire.

Souverain pour soulager le rhume ou la grippe, ou simplement pour se détendre.

Bien chlorophyllement vôtre,

José

Le TOPINAMBOUR

Le TOPINAMBOUR

Légumes-racines

Le  retour en grâce culinaire du TOPINAMBOUR

Le TOPINAMBOUR a été pendant plusieurs siècles un légume de la ruralité. Il était mal-aimé des gens de la ville, parce que – conservé et préparé inadéquatement – ses effets carminatifs avaient la réputation de se manifester bruyamment. La récolte de ce légume-racine populaire débute à la mi-octobre et se poursuit jusqu’en février de l’année suivante.

Après une disgrâce quasi totale de plus de 50 ans, il est revenu progressivement à l’honneur dans l’assiette des gourmets, et aujourd’hui, le voici promu légume de luxe par les grands chefs. En deux mots : consommé jeune et frais, c’est un délice!

Botaniquement, le TOPINAMBOUR appartient à la famille des composées (ou Astéracées). Il s’apparente au tournesol, beaucoup mieux connu chez nous.

Nom botanique :

Helianthus tuberosus Linné

Autres noms vernaculaires en français :

Artichaut du Canada – Artichaut de Jérusalem – Pomme du Canada – Soleil vivace – Truffe du Canada – …

Quelques variétés :

Topinambour Challenger

Topinambour commun blanc

= Celui que cultive principalement Les Jardins de Pomone. Si sa forme très tourmentée et asymétrique en rend l’épluchage laborieux, cet inconvénient est largement compensé par la saveur nettement plus parfumée de sa chair. On est bien récompensé de la peine qu’on a pris. 

Topinambour commun rouge

Topinambour fuseau blanc

Topinambour fuseau rouge

Topinambour-patate

= Celui qui est réapparu  depuis  quelques années dans la grande distribution pour satisfaire une clientèle urbaine demandeuse de « légumes anciens ». Son tubercule est beaucoup moins déformé, plus lisse et plus compact, ce qui simplifie la préparation. Mais le stockage en silo le prive de la finesse de structure et de la subtilité de goût inégalable du topinambour commun fraîchement sorti du sol.

Topinambour Stampede

Topinambour violet de Rennes

Vivace par ses tubercules, cette plante alimentaire est souvent cultivée comme annuelle. Les tubercules (ou rhizomes) sont irréguliers, de forme et de couleurs différentes, selon les variétés. Les variétés en forme de fuseau (à tubercules allongés) sont presque lisses. Les tiges de la plantes peuvent atteindre 2,50 m de hauteur et plus; en été, elles sont surmontées de magnifiques fleurs jaunes. Ce sont des capitules solitaires, semblables à ceux du tournesol, mais en plus petit. (Le diamètre des fleurs ne dépasse pas 10 cm.)

Eu égard à la hauteur de la plante, les racines sont courtes. C’est aux extrémités de leurs importantes ramifications souterraines que ce forment les nombreux tubercules. La chair de ces derniers est ferme, de saveur légèrement sucrée, avec un goût qui rappelle nettement l’artichaut.

Originaire de l’Indiana (États-Unis) ou du Canada, le TOPINAMBOUR a été introduit en France au début du XVIIème siècle. Quelques années plus tard (1617), on évoque sa culture près de Terneuzen (Zélande), dans les bouches de l’Escaut, à l’initiative d’un certain Pieter Hondt, ancien marin reconverti dans l’agriculture. Certains pensent que le mot ‘topinambour’ pourrait dériver du terme topographique Terneuzen.  Étonnant  et peu convaincant!; j’en prends acte, mais cela  paraît à peine vraisemblable.

Sur l’origine du terme ‘TOPINAMBOUR‘, l’explication suivante me paraît beaucoup plus convaincante et, en tous les cas, agréablement anecdotique.
On sait que cette plante rustique a été introduite en France par le brave Samuel de Champlain (1567-1635), gouverneur français du Canada. Celui-ci avait observé qu’en période de disette les indiens Hurons et Algonquins récoltaient et se nourrissaient des tubercules d’un sorte de tournesol.

Philanthrope, Champlain entrevoit aussitôt que ces tubercules, qui poussent presque spontanément et semble pouvoir s’acclimater facilement au royaume des Lys, seraient utiles pour lutter contre la famine lorsque – comme cela arrivait souvent à l’époque – les récoltes traditionnelles étaient mauvaises.

En 1612, il a rapporté en France quelques-uns de ces tubercules, pour les présenter à la régente Marie de Médicis. Une audience lui est bien sûr accordée par la reine-mère et le tout jeune roi Louis XIII. Par pur hasard de calendrier, cette audience est fixée juste après la réception d’un équipage revenu lui du Brésil avec de nombreux produits exotiques, mais surtout avec une délégation de quelques amérindiens richement emplumés et à demi-nus appartenant à la nation des ‘Topis‘, ‘Tupis‘ ou … ‘Tupinambus« . Tant d’exotisme en une seule journée crée la confusion dans les conversations des courtisans, qui finissent par associer indûment le légume des régions froides du Nord au nom les indiens des forêts tropicales du Sud du Nouveau-Monde. Cette histoire cocasse est au moins vraisemblable.

Quoi qu’il en soit, le TOPINAMBOUR a vite connu un franc succès, non seulement en France et aux Pays-Bas, mais dans toute l’Europe. Sa culture domine pendant un bon siècle. Jusqu’au jour où Monsieur de Combles, un agronome très écouté à la Cour de France, publie un savant « Traité de Jardinage » qui deviendra rapidement la bible de l’horticulture du XVIIIème siècle. Dans cet ouvrage de référence, de Combles, lassé des pets émis par les gens du peuple qui – faute de mieux – consommaient trop de ces tubercules, décrète que le TOPINAMBOUR est « le plus mauvais de tous les légumes dans l’opinion générale ». Dès cette époque, la pomme de terre supplante progressivement le TOPINAMBOUR qui finit par disparaître presque complètement de notre alimentation pendant deux siècles.

Sporadiquement, il est revenu sur les tables en période de grande disette, comme ce fut le cas pendant la Seconde guerre mondiale. Ceux qui ont dû le consommer à cette époque, en ont gardé un très désagréable souvenir. La mauvaise réputation du TOPINAMBOUR est pourtant injustifiée, dans la mesure où les vieux tubercules ligneux que l’on mangeait sous l’occupation, étaient bien davantage un produit fourrager destiné au bétail qu’à l’alimentation humaine. Rien à voir avec les jeunes tubercules parfumés provenant d’une des variétés que je vous ai citées au début de ce billet.

CULTURE :

Le TOPINAMBOUR s’accommode de tous les sols, même les plus ingrats. Résistant au froid et la sécheresse, il pousse aussi bien au soleil que dans les endroits ombragés. (Dans ce dernier cas, il n’y a pas ou peu de floraison, mais la qualité des tubercules n’en pâtit pas.)

Comme les pommes de terre ou les crosnes du Japon, cette plante se multiplie par tubercules plantés à environ 10 cm de profondeur, de la mi-mars à la fin avril. La plantation se fait à 60 cm sur des rangs distants de 70 cm. Ce légume préfère un sol pas trop humide (bien draîné), léger, frais et riche en humus. En fonction du degré d’exposition au vent, le buttage peut s’avérer utile au maintien vertical des plants. Choisissez bien l’emplacement, en tenant compte qu’après une première culture de TOPINAMBOURS, il est très difficile d’éradiquer complètement les repousses spontanées les années suivantes.

RÉCOLTE :

De mi-octobre à fin février. Lever les souches à l’aide d’une fourche et récolter les tubercules.

CONSERVATION :

Les meilleures variétés de TOPINAMBOURS se conservent mal, même en silo. Afin d’éviter qu’ils ne sèchent et perdent le meilleur de leur saveur, il vaut mieux les récolter au fur et à mesure des besoins (pour une consommation idéale dans les 48 heures)

INTÉRÊT DIÉTÉTIQUE

Le TOPINAMBOUR est riche en GLUCIDES (15%), dont l’INULINE, sucre assimilable par les diabétiques, et le FRUCTOSE. En revanche, il ne contient que 2% de PROTIDES. C’est en raison de son faible taux de protéines que ce légumes convient plus spécialement aux personnes souffrant d’un syndrome azotémique (= ensemble de manifestations cliniques en lien avec une accumulation d’urée avec d’autres éléments azotés dans le sang.)

Ce légume favorise la sécrétion de lait chez les femmes qui nourrissent au sein. C’est aussi un excellent purgatif.

USAGE CULINAIRE

C’est son goût de fond d’artichaut qui domine. Le TOPINAMBOUR peut se consommer agréablement cru, râpé ou émincé, dans des salades mélangées. Le plus souvent, il est préparé cuit, en beignets, en gratins, à l’étouffée, en purée ou sauté au beurre.

Pour préparer les tubercules il suffit de les laver et de les brosser pour enlever la terre. Pas nécessairement besoin d’éplucher ! Lorsqu’ils sont propres, placez- les dans une casserole l’eau froide avec du sel et un peu de jus de citron (pour éviter l’oxydation). Faites cuire pendant 15 minutes dans l’eau bouillante.

 IDÉES DE RECETTES

  • Chips tricolores (topinambour, vitelotte, betterave rouge)
  • Daube de topinambours
  • Flan de topinambours
  • Galette de topinambour au gruyère
  • Gratin de topinambours
  • Salade verte aux topinambours
  • Sauté de topinambours
  • Soupe de topinambours
  • Soupe de topinambours à l’orange
  • Soupe de topinambours aux petits légumes
  • Soupe rustique
  • Topinambours à la crème fraîche
  • Topinambours à la Darphin (Recette de Guy Martin, restaurant Le Grand Véfour, France)
  • Topinambours à l’ancienne
  • Topinambours au naturel
  • Topinambours aux œufs
  • Topinambours en brouet
  • Topinambours en crème fraiche
  • Topinambours en salade noisetée
  • Topinambours et pommes de terre au gratin
  • Topinambours panés
  • Topinambours sautés
  • Velouté de topinambours
  • Velouté de topinambours à la truffe
  • Velouté de topinambours, fourme et amandes (recette du chef Michel Troisgros)

Le GUARANA

Photo de Anita Fortis, sous licence CC)

Le GUARANA 

le fruit « à œil d’homme » des indiens Tupis

Dans les immenses forêts pluvieuses du bassin amazonien (Brésil) résiste une tribu d’indiens autrefois prospère, puissante et redoutable dont ne subsistent aujourd’hui que quelques milliers d’individus : les Sateré-Mawés. Ethnologues et linguistes ont généralement rattaché cette tribu au groupe plus générique et mieux connu des Tupis.

Ces Sateré-Mawés – qui vivaient en harmonie dans l’exubérance de vie végétale et animale de la jungle qui borde le rio Tapajos, une rivière qui conflue avec l’Amazone à hauteur de la ville de Santarem de Parà.

 

 

Dans l’histoire non-écrite et les légendes ancestrales que se transmettent de génération en génération les descendants de ce peuple, une plante de la forêt amazonienne fait depuis des temps immémoriaux l’objet d’un grande fierté : le GUARANA. En effet, les Sateré-Mawés se considéraient être les premiers à avoir cultivé le GUARANA, là où d’autres tribus se contentaient de la cueillette sauvage des fruits de cette plante de leur pharmacopée commune.

Voici le mythe rapporté par les Anciens :

« Il y a bien longtemps, dans un village de notre peuple, vivait un enfant merveilleux et bien-aimé, qu’un dieu malveillant jaloux s’avisa de tuer. Mais une autre dieu – bienfaisant – prit compassion du chagrin des villageois. Il arracha donc l’œil gauche de la petite victime et alla le planter dans la forêt proche. Sitôt fait, il revint au village, arracha cette fois l’œil droit de l’enfant, et le planta dans le sol au centre du village. »

C’est de cette époque que les Saté-Mawés se prévalent fièrement d’avoir été les premier à domestiquer la liane grimpante chargée de vertus magiques et médicinales que les botaniste appellent : Paullinia cupana Kunth (famille des Sapindacées).

Domestication ne veut pas dire monopole. Au Paraguay, au Vénézuela (Orénoque), en Guyane, d’autres tribus indiennes du groupe Tupis utilisaient et utilisent toujours la même plante pour des rites et des usages médicinaux sensiblement identiques. Parfois, comme en Uruguay, les botanistes ont éprouvé le besoin de distinguer une espèce différente : Paullinia sorbilis Linné. Mais ces subtilités académiques sont restées sans prise sur la culture Tupis, qui réservait le même nom de GUARANA et les mêmes usages aux différentes espèces ou sous-espèces éventuelles.

Le GUARANA est une espèce à tiges ligneuses, grimpantes, pouvant atteindre un longueur de 15 m, l’équivalent de la hauteur d’un immeuble de 4 à 5 étages.

(Photo de Denis Barthel, sous GNU General Public Licence)

Les feuilles – de type imparipennées – sont composées de cinq folioles de forme ovale-lancéolée.

Les grappes axillaires de fleurs – petites et de couleur jaune – se chargent après nouaison de fruits sphériques, apiculés (= fixés sur une tige dépourvue de feuilles) , rouges à maturité, déhiscents par trois valves.

(Photo de A.C. Moraes, sous licence CC)

Les capsules renferment des graines noires et brillantes d’une taille comprise entre celle d’un grain de café et celle d’une noisette. Chacune de ses graines est entourée d’un arille – c‘est-à-dire une enveloppe protectrice charnue – à la couleur rougeâtre.

Torréfiées, lavées, broyées, ces graines servent à préparer un pâte rouge très riche en caféine, ou plus exactement en guaranine (substance analogue à celle extraite du café, mais trois fois plus forte) . La pâte obtenue permet de préparer une tisane traditionnelle terriblement diurétique et excitante dont la consommation en quantité raisonnable produirait un heureux effet dans la dégradation des graisses du corps (lipolyse), et jouerait donc un rôle amincissant.

 

 

Les Indiens prêtent à cette même tisane des propriétés de « coupe-faim » pour les périodes de disette, d’antidiarrhéique, d’antinévralgique et d’aphrodisiaque que la science moderne tente d’évaluer lentement et objectivement, tandis que le marketing moderne lui, s’emballe et s’empresse de valoriser des produits et sous-produits de graines de GUARANA dont ni le dosage, ni l’innocuité ne sont objectivement démontrés.

Le marché des nouvelles boissons énergisantes a explosé ses dernières décennies, et le GUARANA y tient souvent un rôle important dans leur composition. Au Brésil , où la population représente plus de 210.000.000 de consommateurs potentiels, le soda vendu sous la marque « Antartica » est la seconde boisson nationale, immédiatement après …le « Coca cola».

José

Le TARO

Légume-racine exotique :

Le TARO

Le TARO (Colocasia esculenta) est avant tout un légume-racine des pays au climat chaud et humide. Outre le tubercule – de loin le plus consommé – on peut en manger également les feuilles et les spathes ( = grandes bractées qui entourent le groupe floral).

(photo :  Kahuroa, NZ)

Les feuilles et tiges du TARO, récoltées jeunes, ne sont comestibles qu’après cuisson. Ce sont des ingrédients culinaires courants en Asie tropicale. A la Réunion et dans l’île Maurice, ces feuilles font partie des « brèdes« , terme créole dont je vous ai déjà parlé sur ce blog en présentant la « brède mafane » malgache.

Il appartient à la famille botanique des Aracées, laquelle regroupe d’autres plantes – décoratives celles-là – aussi connues et éloignées de nos assiettes que l’arum, le gouet ou le philodendron . Le TARO est un légume fort ancien dont l’origine est très controversée. La Birmanie et l’Etat indien d’Assam semblent être le berceau de ce légume dont la culture remonte à au moins 4.000 ans.

Ci-dessus , une illustration de la floraison du Taro qui pourrait suggérer erronément qu’il s’agit d’une fleur ornée d’un seul grand pétale, ce qui n’est botaniquement pas le cas. Le pseudo-pétale est en réalité une spathe enveloppant un axe charnu appelé spadice, chargé lui d’innombrables et minuscules petites fleurs tant mâles que femelles. 

Depuis cette époque lointaine, il s’est répandu en Chine (3ème producteur mondial) et en Malaisie, et de là, est parti à la conquête de toutes les régions chaudes et humides de la planète. On le retrouve en Inde, aux Philippines, en Afrique (le Nigéria et le Ghana en sont les deux premiers producteurs mondiaux), en Océanie (îles Hawaii, Nouvelle-Zélande, Nouvelle-Calédonie), aux Antilles (Guadeloupe, Martinique), dans l’Océan indien (île de La Réunion) …

Le mot « TARO » est d’origine polynésienne et c’est sous ce nom qu’il est généralement vendu en France et en Belgique. Passé dans la langue vernaculaire, le terme polynésien a pris chez nous un sens générique, même s’il désigne en fait plusieurs genres et des centaines d’espèces botaniques différentes.

Parmi les principaux genres consommés, retenons Alocasia, Amorphophallus, Colocasia et Xanthosoma.

Pratiquement, c’est le seul genre COLOCASIA (Colocasia antiquorum, Schott ou Colocasia esculenta) qui est commercialisé et consommé chez nous.

Pour donner à ce billet une touche plus exotique, je vous propose ci-après quelques autres noms du TARO selon la région géographique et culturelle où il est cultivé. (Je serais très reconnaissant à nos ami(e)s de la francophonie d’outremer qui voudraient me communiquer d’autres noms vernaculaires dont ils auraient connaissance, histoire d’enrichir ma documentation sur ce légume.)

Tout d’abord, il y a le terme « DASHEEN« . C’est un vocable anglais très utilisé dans tout le Commonwealth pour désigner ce légume et parfois francisé en DACHINE. Mais il a une consonance tristounette, un peu impérialiste et victorienne, et je lui préfère largement les noms évocateurs et colorés ci-après :

 Chine : « Katchu »
 Guadeloupe : « Madère », « Malango »
 Guatemala : « Quiquisque »
 Guyane : « Tayove »
 Haïti : « Malanga », »Mazoumbel »
 Hawaii : « Kalo », « Poï »
 Inde : « Arvi » (Hindi), « Chama dumpa » (Telugu), « Cheppankizhangu« , « Eddo« 
 Java : « Tales »
 La Réunion : « Arouille violette », « Songe » (aussi à Madagascar)
 Nouvelle-Calédonie : « Coborée », « Coboué », « Néré »
 Martinique : « Chou-caraïbe », « Chouchine », « Dachine »
 Philippines : « Gutah », « Wahig »

Le taro dans notre alimentation

o Valeur nutritive des tubercules : 55 cal
o Riche en fibres
o Calcium : 86 mg
o Fer : 178 mg
o Protéïnes : 7,7 gr
o Acides animés (cystine, isoleucine, lysine, méthionine, phénylalanine, thrèonine, tyrosine, …)
o Vitamine A (rétinol), vitamine B1 (thiamine), vitamine B2 (riboflavine) et vitamine C (acide ascorbique)

Parmi les propriétés thérapeutiques liées à la présence – isolée ou combinée –  de ces substances, retenons les effets : anti-anémique, anti-faim, antioxydant ainsi qu’une action préventive des troubles cardio-vasculaires. (En qui concerne les antioxydants naturels, je rappelle leur rôle essentiel dans la prévention de différents cancers.)
Le TARO occupe la place méritée d’un excellent aliment nutritif de base dans de très nombreux pays.

Le taro en cuisine

Le tubercule vertical du TAR0 consommé en Europe a souvent une forme qui rappelle celle d’un navet. Sa chair est ferme, blanche, violette ou parfois noirâtre. Son goût rappelle celui de la pomme de terre agrémenté de celui, plus subtil, de la châtaigne.

Lorsque vous achetez des TAROS, il faut veillez à ce que chaque tubercule soit bien ferme et lourd. Vous pourrez ensuite les conserver sans problème pendant une huitaine de jours dans le compartiment à légume au bas de votre réfrigérateur.

La TARO (aussi bien son tubercule que ses feuilles) doit se consommer exclusivement cuit. En effet, il contient une quantité importante d’oxalate de calcium, substance irritante pour les muqueuses et la peau. Ce qui revient à dire qu’avant cuisson, il est toxique !!!

La grande émotion de la cuisinière occidentale qui « ose » pour la première fois le TARO est le changement de couleur de la chair du tubercule en cours de cuisson qui de blanche, peut virer au jaune, au gris ou même au violet.  Pas de panique, ce phénomène est tout à fait normal et ne doit pas vous faire remettre en question la qualité de l’ingrédient.

Il est possible de congeler vos TAROS épluchés, après les avoir mis à blanchir pendant environ cinq minutes. Pour l’épluchage, un sage précaution consiste à enfiler une paire de gants parce que la peau poilue des tubercules contient une substance irritante à laquelle réagissent fort certaines personnes.

Les tubercules du TARO se préparent comme les pommes de terre. cuits dans l’eau bouillante, nature ou retravaillés en purée, en ragoût et en friture. Ils doivent être servis chauds, parce que le refroidissement modifie significativement la structure, qui devient alors peu agréable à consommer.

Personnellement, la préparation de racines de TARO qui m’a le plus séduit à ce jour est la cuisson sous la braise, telle que la pratique traditionnellement les Maoris de Nouvelle-Zélande.

Les tubercules peuvent également être séchés et réduits en farine. Parfois, cette farine est fumée. Sous cette forme, ils sont consommés depuis des siècles par les marins des jonques et les caravaniers chinois.

En ce qui concerne la cuisine des feuilles du COLOCASIA, j’ai découvert il y a quelques années un excellente recette indienne  de rouleaux préparés avec les limbes de la plante, une préparation  que les autochtones  du Maharashtra (État de Mumpaï) appellent : ALU-WADI. Un vrai délice avec, cependant, un ingrédient assez rare dans le commerce en Europe.

Bien chlorophyllement vôtre,

José

Voir l’article

L’ANACARDIER et ses NOIX DE CAJOU

 

La NOIX DE CAJOU

fruit de l’ANACARDIER (Anacardia occidentale)


Ce fruit sec est l’amande d’une espèce d’ANACARDIER originaire du nord-est du Brésil et des Caraïbes, dit « POMMIER-CAJOU », un arbre botaniquement proche du manguier et du pistachier. Le nom propre qui devrait désigner l’amande est donc ANACARDE, mais il est fort peu usité dans la langue courante.

Le terme CAJOU provient d’une altération phonétique faite par les explorateurs portugais du nom que les indiens TUPIS appelaient ACAÏOU ou ACAJOU.

Ce ne sont pourtant pas les Portugais qui auraient remarqué l’arbre avec les usages médicinaux et alimentaires qu’en faisaient les TUPIS. Ce mérite est attribué à un religieux français – très érudit – originaire d’Angoulême : André THEVET (1516-1590), aumônier de l’expédition dirigée par l’amiral de VILLEGAGNON en 1555-1556 pour le compte du roi de France, HENRI II. Il nous en a laissé dès 1557 la première description écrite.

Mais ce qui revient vraiment aux colonisateurs portugais dès le 16ème siècle, c’est la dispersion de cet arbre du Brésil et des Caraïbes vers deux autres continents où ils possédaient des comptoirs commerciaux : l’Afrique et l’Asie. Ils sont les organisateurs de la culture du «pommier d’acajou» dans les régions chaudes qu’ils contrôlaient alors; ce qui explique la place plusieurs fois séculaire que cet ingrédient sud-américain tient dans la cuisine ethnique locale des zones tropicales de trois continents.

Le commerce de la NOIX DE CAJOU n’a pourtant pris un réel essor économique quà partir du début du 20ème siècle. Les plus importants pays producteurs sont aujourd’hui l’Inde (qui monopoliserait près de 90% de la production mondiale), le Brésil, le Mozambique, le Nigéria, la Tanzanie, le Sénégal et la Côte d’Ivoire .

L’ANACARDIER atteint de 10 à 12 m de haut. Dès sa troisième année, il produit des fruits pendant plus de 20 ans..

Cette « pomme à coui…s » – comme me la désignait pour la première fois et avec un sourire mon guide et ami Omar M’Pemba à Mombasa (Kénya) … en 1974 – est un faux fruit de forme de piriforme qu’il est plus décent d’appeler «pommier d’acajou».

Chaque « pomme » ne produit qu’une seule noix dure, qui se développe singulièrement en dessous et à l’extérieur de la drupe, elle-même molle et très juteuse. De couleur jaune ou rouge vif, elle mesure de 5 à 10 cm de long et de 4 à 5 cm de large. Sa chair jaune, fine et rafraîchissante est très riche en vitamine C, beaucoup plus que l’orange par exemple.

Quant à la noix de cajou elle-même, elle mesure environ 3 cm et est recouverte de deux coquilles. Une coquille extérieure lisse et fine, qui change de couleur à mesure que le fruit se développe, passant du vert olive au rouge brunâtre. Une coquille intérieure très dure qui se casse difficilement. Entre les 2 coquilles se loge une huile résineuse connue sous le nom de « baume de cajou » ou « cardol ». Cette substance très caustique provoque des brûlures et des ampoules sur les doigts et sur les lèvres lorsque l’on tente d’extraire la noix manuellement ou en la mordillant. Ce fluide corrosif est utilisé notamment pour fabriquer des vernis et des résines qui protègent le bois contre les termites, des produits imperméabilisants, de l’encre et des insecticides, tandis que l’arbre fournit un bois précieux très dur et l’écorce renferme une gomme jaunâtre que l’on utilise comme la gomme arabique.

Pas besoin d’échelle pour la cueillette; les pommes de cajou se récoltent directement sur le sol, où elles tombent à maturité. L’extraction des noix nécessitent d’abord un séchage au soleil pendant deux jours. Ces noix sont ensuite décortiquées, nettoyées et triées dans un long processus à l’issue duquel elles sont humidifiées durant quelques heures, histoire de les attendrir. Ensuite, elles devront être grillées un première fois, cette opération étant indispensable pour l’élimination du liquide corrosif qu’elles contiennent encore. Suit un écalage mécanique à l’issue duquel elle devront être grillées une seconde fois avant de pouvoir être conditionnées pour la commercialisation.

A remarquer que les noix de cajou rancissent assez rapidement. Leur conservation dans une bonne qualité gustative nécessite un conditionnement dans des contenants spéciaux. Lorsque l’emballage hermétique qui les contient est entamé, je vous conseille de placer l’excédent dans une boîte au réfrigérateur. La congélation donne également un bon résultat.

L’ONAGRE : le « Jambon du jardinier »

Légumes anciens à redécouvrir :

L’ONAGRE

le « jambon du jardinier« 

A notre époque, ce sont surtout les femmes qui connaissent encore l’onagre. Bien moins comme légume d’ailleurs, que comme source de remèdes naturels. En effet, l’huile extraite des graines de cette plante est particulièrement riche en acides gras polyinsaturés, notamment en acides gamma linéoliques. Chez les personnes souffrant de syndromes prémenstruels, de règles douloureuses, de troubles liés à la ménopause, cette huile précieuse peut rétablir progressivement un équilibre hormonal durable par la régulation du niveau de prostaglandine. De même, son efficacité est avérée pour soigner certaines affections cutanées, comme l’acné, l’eczéma ou la peau sèche. Et la médecine moderne fonde de gros espoirs sur le rôle que cette plante pourrait jouer dans le traitement de la sclérose en plaque. Des recherches portent également sur l‘acide gamilinoléique contenu dans l’essence de cette plante, un anticoagulant qui favoriserait la perte de poids chez les individus en surcharge pondérale.

L’ onagre, que l’on appelle aussi œnothère, appartient à la famille des onagracées et y forme un genre botanique dans lequel on peut dénombrer environ 80 espèces. Aucune de ces espèces n’est toxique. Celle dont je vous parle plus spécialement aujourd’hui, est sans doute la plus commune: l’ONAGRE BISANNUELLE (Œenothera biennis). Ce choix n’est pas dû au hasard; il s’agit non seulement d’une plante médicinale, mais aussi d’un de ces fameux « légumes anciens » qu’on se plaît aujourd’hui à redécouvrir dans nos assiettes.

Détail amusant, cet excellent légume dont on consommait principalement les racines au 19ème siècle sous les noms populaires de « jambon du jardinier », « jambon de saint Antoine » ou « herbe aux ânes » est classé chez nous parmi les « plantes invasives« , au même titre que la renouée du Japon, la balsamine de l’Himalaya ou la berce du Caucase. Elle aurait été introduite une première fois en Europe en 1614, à l’occasion du déchargement d’un vaisseau en provenance de Virginie dans un port hollandais. Cette introduction serait plutôt accidentelle que volontaire. On pense que des graines d’onagre – elles sont toutes petites – se trouvaient dans du sable prélevé sur les rivages de la colonie anglaise d’Amérique pour remplir les sacs de jute qui servaient au lestage des cales des navires.

La nation amérindienne des Objiways était nombreuse, fière et redoutée. Selon la tradition, elle était la seule à avoir pu résister victorieusement à celle des Sioux. L’onagre figurait à leurs menus … et dans leur pharmacopée.

Chez les « Peaux-rouges« , l’onagre était déjà utilisée comme légume et comme plante médicinale bien avant l’arrivée des « visages pâles« . Les tiges et les feuilles se consommaient bouillies, les racines fraîches ou séchées chez les indiens de la grande nation des Objiways, dont les tribus occupaient d’importantes régions à l’Est du Canada et des futurs Etats-Unis. Ces sauvages – « bons par nature« , comme les définissait le philosophe J.-J. Rousseau – s’émerveillaient des fleurs jaunes très lumineuses et parfumées de l’onagre, qui avaient la particularité de s’épanouir subitement – en quelques minutes – au coucher du soleil et pour la durée d’une nuit seulement. Leur parfum suave attirait alors en grand nombre les oiseaux-mouches (colibris), les papillons de nuits et de nombreux autres insectes comme pour un grande fête d’initiés noctambules . C’est ce qu’évoque deux noms populaires de l’onagre : « belle du soir » ou « primevère de la nuit« .

copyright : les Jardins de Pomone asbl

En Europe, l’onagre s’est si parfaitement naturalisée en quatre siècles, qu’elle figure – comme je l’ai déjà signalé plus avant – parmi les plantes invasives des zones tempérées. Outre dans les jardins, où elle a été introduite par l’homme pour la décoration et la culture potagère, elle se plaît le long des routes et des canaux, dans les dunes, les terrains vagues … et même sur les versants des terrils qui jouxtent nos anciens charbonnages. A remarquer que pour beaucoup de botanistes, l’onagre bisannuelle proprement dite doit être considérée comme une espèce européenne issue d’une souche américaine, mais aujourd’hui morphologiquement distincte. Pour d’autres, elle est simplement subcosmopolite.

Comme plante médicinale, l’onagre a connu un âge d’or en Angleterre, parce que c’est elle qui servait à la préparation de la fameuse « Panacée du Roi » (the « King’s cure-all« ). Il s’agissait d’une infusion de feuilles et de tiges séchées de la plante, réputée soulager rapidement des crises d’asthme et des rhumes.

copyright : les Jardins de Pomone asbl

copyright : les Jardins de Pomone asbl

L’onagre en cuisine

  • Les feuilles

Lorsqu’elles sont cueillies avant la floraison, les jeunes feuilles – juteuses et tendres – forment de belles rosaces facile à récolter et délicieuses dans les salades mélangées. Les feuilles moins jeunes seraient un peu plus indigestes et on recommande souvent de les consommer bouillies ou cuites à l’enmbeurrée. Personnellement, je n’ai jamais eu de difficulté à digérer des feuilles matures crues. Mais je pense, qu’il faut éviter de les consommer si elles sont récoltées en période de sécheresse. En effet, le début de rupture hydrique qui peut ce produire en été dans certains potagers provoque le rougissement d’une partie des feuilles de l’onagre, tandis que les autres restent vertes. Dans ce cas, les feuilles rouges sont inconsommables, et les feuilles restées vertes sur la même plante ne sont plus idéalement propres à la consommation gourmande.

copyright : les Jardins de Pomone asbl
  • Les racines

A la faveur d’un été pluvieux, les racines sont déjà assez développées pour être consommées dès la fin du mois de juillet. Leur diamètre varie alors entre 1 et 3 cm, et elles sont idéales pour une consommation crue, comme le radis. Mais elles atteindront facilement 5 cm de diamètre vers la fin du mois de septembre, et pourront à ce moment être préparées comme du chervis, de la raiponce, des salsifis ou des scorsonères.. Préparées à l’huile ou au vinaigre, elles ont une saveur qui rappelle celle du chou-navet (rutabaga) et se servent en hors-d’oeuvre.

Au Québec, on prépare des « baniques« , sorte de pains confectionnés jadis par les trappeurs avec de la racine d’onagre séchée réduite en farine. C’était un aliment de survie assez rude pour affronter l’hiver canadien, mais il se consomme aujourd’hui garni de farces agréables et variées qui les rendent fort savoureux.

  • Les fleurs

Elles sont comestibles. Belles à ravir, délicieusement parfumées, riches en pollen et en nectar, on doit se demander pourquoi cette fleur n’est pas plus souvent citée et utilisée dans la cuisine actuelle. La raison la plus plausible est la vie très éphémère de la fleur, qui implique qu’elle soit consommée dans les quelques heures qui suivent sa récolte. A découvrir absolument !

Votre bien chlorophyllement dévoué,

José

copyright : les Jardins de Pomone asbl

Le SOUCI ou CALENDULA OFFICINAL

Cuisine des fleurs :

Le Souci ou Calendula officinal

« Mes soucis, je les mange joyeusement ! »

On trouve souvent dans les potagers – et surtout aux Jardins de Pomone – des plantes qui semblent ne pas être à leur place aux côtés des légumes bien mieux connus d’une culture principale. Pour le non-initié, cela peut faire un peu « désordre » et sembler « illogique« . Pourtant, ces apparents caprices de voisinage – patiemment recherchés et favorisés par le jardinier – contribuent discrètement au bon fonctionnement d’un petit écosystème. Chaque potager doit être un îlot d’équilibre vital qui tend à favoriser la récolte de légumes plus nombreux, de belle taille, de bon goût et de meilleure qualité sanitaire.
Il ne faut donc pas hésiter à occuper toute la surface du sol qui – après la mise en place des légumes principaux dont la culture est généralement plus longue – se dévitaliserait en restant dénudée . « Terre nue, terre perdue »; on ne le répétera jamais assez souvent. Pour occuper ces espaces intermédiaires entre les légumes, voici quelques exemples de plantes de culture secondaire réputées pour leurs qualités particulières de bons voisinages.

AIL (près des fraisiers, des haricots, des laitues …)
ANETH (près des carottes, des céleris, des choux, des poireaux …)
BOURRACHE (près des concombres, des courgettes, des fèves, des fraisiers, des tomates …)
CAMOMILLE (près des brocolis et des choux, des petit pois, des tomates …)
CORIANDRE (près des épinards, de la tétragone, des radis …)
FENOUIL (près des choux, des poireaux, des potirons …)
TRÈFLE (près des choux et spécialement les choux de Bruxelles …)

Quant au CALENDULA OFFICINAL, plus connu sous le nom de SOUCI DES JARDINS, je l’utilise beaucoup au potager, non seulement parce qu’il se marie harmonieusement avec l’artichaut et le haricot à rames, mais encore pour ses jolies fleurs comestibles. C’est spécialement à lui que je consacre ma note de ce jour.


Le CALENDULA OFFICINAL (Calendula officinalis Linné) appartient à la famille des Astéracées (anciennement désignée Composées). C’est une plante annuelle herbacée rustique qui aime les emplacements ensoleillés ou mi-ombragés. Son origine botanique est incertaine, mais assez vraisemblablement méditerranéenne. Très répandue, elle est qualifiée dans le jargon des botanistes de « plante subcosmopolite ».
Ses nombreuses feuilles au limbe lancéolé sont portées par des tiges légèrement ramifiées et répandent un parfum aromatique très particulier. Les fleurs en capitule solitaire des variétés les plus courantes varient du jaune à l’orange éclatant. Mais leur valeur décorative a été fortement développée avec des obtentions de cultivars à fleurs doubles tels que :

Art Shades (hauteur : 60 cm) aux fleurs de couleur abricot, orange ou crème
Calypso (hauteur : 25 cm), aux fleurs de couleur orange ou jaune avec un coeur presque noir
Fiesta Gitana (hauteur : 30-40 cm), à fleurs souvent bicolores, mais végétation moins haute (30-40 cm)
Midas (hauteur : 70 cm), dont les grandes fleurs à couper sont destinées aux fleuristes
Orange King (hauteur 30-45 cm), au fleur d’un orange exceptionnellement lumineux
Pacific Beauty (hauteur 60 cm), dont les fleurs aux pétales jaune, orange ou crème ont un coeur brun-rouge
Radio (hauteur 40 cm), dont les pétales de couleur orange sont courbés à la manière de certains dahlias

Je me souviens que dans les années ’60-’70, j’ai appris chez des paysans italiens une jolie expression pour désigner le calendula : la « fiore d’ogni mese », autrement dit la « fleur de chaque mois« . Ce n’est pas par hasard, puisque si vous prenez la précaution de pincer régulièrement les fleurs fanées, une abondante floraison de cette plante vous sera assurée sans interruption pendant plusieurs mois. Chez nous, en Belgique – ou le climat est moins clément que sur les rives du lac de Garde ou de l’Arno – le plaisir dure de mai à novembre.
La consommation (modérée) des fleurs de souci est excellente pour la santé. Très mellifères, elles contiennent des principes amers, des flavonoïdes, du mucilage, de la saponine … bref, un ensemble de composants qui confèrent à l’ingrédient frais des propriétés antiseptiques, astringentes, diaphorétiques, diurétiques et … régénératrices. N’hésitez donc pas à répandre une pincée de pétales sur vos salades d’été, c’est joli, rafraîchissant et tellement bon pour la santé. Attention néanmoins ! La consommation importante et régulière de calendula doit être déconseillée en période de grossesse.
Séchés, les pétales étaient utilisés jadis pour colorer les gâteaux et les riz, un peu comme on le ferait avec du safran ou du curcuma. En hiver, lorsque les vaches laitières restaient à l’étable et que – faute de pâturage – le beurre préparé avec leur lait était presque blanc – caractéristique peu appréciée -, on ajoutait du calendula séché dans la baratte pour en améliorer l’aspect et le goût.
Avis aux cordons bleus féru(e)s de produits sains, simples et naturels non disponibles dans les magasins. Un petit délice condimentaire peut être préparé avec les boutons non éclos de vos soucis. Il suffit de les confire au vinaigre, comme vous le feriez avec ceux des câpres, des capucines ou des pissenlits. C’est facile, cela prend peu de temps et vos invités seront certainement séduits par cet ingrédient maison agréable et bienfaisant.

Votre bien chlorophyllement dévoué,

José

Le SOUCI ou CALENDULA OFFICINAL

Le GINKGO BILOBA, « fossile vivant » et bienfaisant

Le GINKGO BILOBA

Un arbre mythique et bienfaisant qui peut vivre 4000 ans …

À l’entrée du parking de la FERME NOS PILIFS – la plus importante entreprise bruxelloise de travail adapté pour l’intégration de travailleurs affectés d’un handicap mental ou physique – pousse un bel arbre atypique qui interpelle nos visiteurs et que mes amis et moi croisons tous les jours. Chargé de symboles, de légendes et de vertus : zoom sur le … GINKGO BILOBA.

La pharmacopée chinoise regorge d’innombrables plantes médicinales dont la réputation a atteint souvent le monde occidental. Consacrées par des traditions parfois vieilles de plusieurs millénaires, un certain nombre d’entre elles se révèlent être aussi aujourd’hui d’un grand intérêt scientifique. Les plus connues en Europe sont le GINSENG (Panax ginseng) et le GINKGO, pour lesquelles la demande est de plus en plus importantes.
C’est spécialement du GINKGO que je veux vous parler ici, notamment parce que ses propriétés médicinales ont pu être plus clairement définies et scientifiquement prouvées que pour d’autres plantes.
Dans l’évolution de la vie végétale – qui s’est amorcé il y a environ 500 millions d’années avec les algues – les GINKGOS sont apparus sur la terre il y a environ 200 millions d’années, à peu près à la même époque que les Conifères.
Si les conifères sont toujours très présents sur la planète aujourd’hui, le sous-embranchement du règne végétal auquel appartiennent les GINGKOS a perdu – au fil des ères géologiques – tous ses représentants. TOUS ? Oui, à une exception près : le GINKGO BILOBA !!!
C’est pourquoi cet arbre remarquable, qui peut vivre plusieurs milliers d’années – mérite sa qualification de « fossile vivant » et suscite la curiosité, voire la dévotion (notamment dans la culture bouddhique).

Bien que le GINGKO BILOBA ressemble à beaucoup d’arbres de la division des Angiospermes à feuilles caduques , il appartient – tout comme ses contemporains les conifères – à la division des Gymnospermes, qui regroupent des plantes dont le mode de reproduction sexuée est beaucoup plus primitif. Ses graines ne sont pas contenues dans un fruit; elles se développent directement à l’air libre, groupées par deux sur leur pédoncule. Leur aspect rappelle celui d’une mirabelle, tant par la forme que par la taille. Mais ce qui ressemble à un fruit est botaniquement une graine simplement protégée par un tégument extérieur charnu et épais, de couleur jaunâtre.

Le GINKGO BILOBA fait partie des plantes dites dioïques, c’est-à-dire que les organes mâles et femelles ne sont pas rassemblés sur un même arbre, mais bien sur deux arbres différents de sexe distinct. S’il est généralement difficile de distinguer les arbres femelles des arbres mâles, cette distinction peut se faire simplement à partir de la période de floraison et pendant la période de maturation des graines. De façon plus subtile, les connaisseurs peuvent aussi observer au printemps que le débourrement des feuilles des arbres mâles précède d’environ deux semaines celui des arbres femelles.
Dans nos régions, il n’est pas rare de rencontrer le GINKGO BILOBA comme arbre d’ornement dans les parcs et domaines; il est majestueux, atypique, particulièrement résistant aux maladies et à la pollution. Mais curieusement, on ne plante pratiquement que des arbres mâles. En effet, les graines des ginkgos femelles sont réputées (à juste raison !) dégager des odeurs forts désagréables.
Dans la pharmacopée traditionnelle chinoise, ce sont les grosses graines écorcées, cuites ou grillées avant d’être conservées dans de l’huile, qui sont utilisées pour combattre des troubles respiratoires tels la toux, l’asthme ou la tuberculose. On leur prête aussi des vertus vermifuges, calmantes et digestives.
En Occident, l’usage médicinal des graines est méconnu. Ici, ce sont les feuilles qui sont spécialement appréciées comme remède. La recherche moderne a pu identifier dans celles-ci la présence d’une soixantaine de produits actifs, parmi lesquels des flavonoïdes, précieuses substances antioxydantes responsables de la pigmentation des végétaux. Les extraits de feuilles sont utilisés pour combattre les troubles de la circulation sanguine, notamment au niveau du cerveau et des jambes.
Grâce à des études approfondies et des tests nécessitant un appareillage coûteux, l’efficacité de ces extraits a pu être scientifiquement démontrée, même si le mécanisme d’action reste encore insuffisamment expliqué.

Le GINKGO : quelques valeurs symboliques

En dehors de la botanique et de la médecine, le GINGKO fait aussi l’objet de vénération pour ses valeurs symboliques.
La forme atypique de sa feuille a capté depuis longtemps l’attention des penseurs – mystiques et philosophes – qui y voient le symbole idéal d’un concept : « L’unité dans la dualité » !
Sa longévité exceptionnelle peut symboliser la survie et la rédemption dans les épreuves qui opposent les hommes aux hommes et aux forces de la Nature. Les Tibétains l’appelle « Arbre de vie » et veillent à l’entretenir à proximité de leurs temples bouddhistes. Les Japonais le vénère depuis des siècles comme un symbole de renaissance quasi miraculeux. Et ce symbole s’est renforcé encore dans le cœur du peuple nippon, lorsqu’à la fin de la seconde Guerre mondiale, le 6 août 1945, un avion américain largue une bombe atomique sur la ville d’Hiroshima : un désastre sans précédent ! Au moins 70 000 civils périssent atrocement; tout est calciné, la moindre végétation comprise.
A quelques centaines de mètres de l’épicentre, le GINKGO BILOBA sacré qui pousse dans le jardin du temple d’Housenbou depuis 150 ans au moins est lui aussi totalement brûlé et détruit. Présage funeste d’une fin irréversible ? Non ! Quelques mois plus tard, alors que le site est toujours totalement irradié et déserté de toute forme de vie, un tout petit arbre frêle apparaît soudain dans la souche du ginkgo sacré du temple. Et il est le tout premier signe de vie et d’espoir qui réapparaîtra à Hiroshima, en parfaite santé d’ailleurs …

CARTHAME

Le Carthame

Epice faussaire, plante bienfaisante !?

Le carthame (Carthamus tinctorius) fait partie de la famille botanique des Astéracées. Et l’aspect végétatif de cette plante rappelle fortement celui de son cousin le chardon-marie, en ce compris les épines, mais sans marbrures blanc-lacté sur les limbes et avec les capitules regroupant des fleurons d’un rouge vif orangé au lieu de bleu-violet.

Fleur de carthame

Fleur de chardon-marie (Sylybum marianum)

Depuis une très haute Antiquité, l’homme a cultivé essentiellement le carthame comme plante tinctoriale, c’est-à-dire une plante dont on peut extraire des substances colorantes destinées à différents usages.
Le carthame, pour sa part, permet de produire deux substances colorantes différentes à partir de ses graines et de ses fleurs. L’une est jaune et hydrosoluble ; l’autre, rouge orangé, n’est pas soluble dans l’eau.

Ces substances colorantes dont l’utilisation est attestée archéologiquement comme très ancienne (On en aurait retrouvé dans le tombeau du pharaon Toutânkhamon – mort vers 1347 av. n.è. – des objets de décorations teintés au carthame), ont essentiellement été utilisées pour les tissus … et en moindre mesure dans l’alimentation.

Les robes des moines bouddhistes sont l’illustration de la couleur orangée intense et stable donnée aux tissus par le carthame.
Comme colorant alimentaire, le carthame s’est surtout distingué comme substitut de l’épice la plus chère au monde, celle obtenue à partir des étamines d’un crocus particulier : le fameux safran. Mais comme le carthame n’est ni rare ni onéreux à produire, il s’est vu affubler de surnoms un peu méprisants tels que « faux safran», « safran bâtard » ou « safran des teinturiers ».

Et de fait, combien d’entre nous ne se sont pas fait arnaquer dans un commerce en repartant avec un peu de poudre de carthame, tout en croyant avoir acheté de la poudre de safran. Cette duperie est multiséculaire !

Si le safran est à proprement parler une épice, le carthame ne l’est pas vraiment, même s’il est vendu comme tel. En réalité, il n’a pratiquement pas d’odeur, et sa saveur insignifiante ne lui permet pas d’aromatiser des plats. (La coloration du riz des « paëllas » ou des « soupes de poisson » industrielles est évidement due au carthame … et les gourmets n’y retrouvent pas leur compte !)

Pauvre carthame !? Enfin, non, pas vraiment; parce que cette plante quasi sans goût et sans saveur que certains font passer trompeusement pour du safran a des vertus médicinales et nutritives plus discrètes que sa magnifique couleur, et plus utiles que celles du véritable safran.

La pression à froid des graines, oléagineuses et assez grandes, fournit une excellente huile de table, riche en acides gras polyinsaturés. L’usage culinaire de cette huile est spécialement indiqué pour les personnes dont le taux de cholestérol est trop élevé.
Assez curieusement ( le mot « carthame » serait-il désuet en terme de marketing ?), elle est souvent vendue sous la dénomination de « huile de chardon ».

En usage thérapeutique, il faut remarquer les nombreux effets bienfaisants que pourrait apporter une simple tisane de fleurs de carthame séchées. (Une cuillerée à café de fleurs séchées pour 25 cl d’eau chaude). Ce « thé » de carthame est considéré comme un laxatif efficace. Sa consommation ferait tomber la fièvre en provoquant une sudation rapide.

Il est aussi indiqué pour soulager les personnes souffrant de troubles coronariens ou de troubles menstruels. (Son ingestion est cependant contre-indiquée pendant la grossesse.)

L’infusion a aussi la réputation de favoriser la guérison de la rougeole ou de la jaunisse.

Fameux également dans la médecine traditionnelle chinoise, des cataplasmes de fleurs séchées posés sur la peau pour soulager les articulations rendues douloureuses par une crise de rhumatisme ou enflées par une entorse.

Allons, bon ! Désormais, peut-être un peu plus de respect pour un présumé faussaire…